Cela fait 10 ans, ce 28 septembre 2019, que plus de 156 personnes ont été tuées et des dizaines de femmes violées au stade de Conakry par des militaires. Un décennie plus tard après les tueries qu’un rapport des Nations Unies a qualifiées de crimes contre l’humanité, les victimes attendent toujours justice.
Le lundi 28 septembre 2009 a été une journée noire à Conakry. Des manifestants opposés à la candidature aux élections présidentielles du chef de la junte militaire, capitaine Moussa Dadis Camara sont réprimés dans le sang par l’armée. Bilan : plus de 156 morts, une centaine de femmes violées et de nombreux portés disparus, selon des organisations de défense des droits de l’homme.
Dix ans après ce tragique évènement, les victimes attendent toujours un procès des auteurs et commanditaires. « Aujourd’hui, notre plus grand souhait est que justice soit rendue parce que les commanditaires de ces tueries sont dans la rue. Certains occupent des postes de responsabilité, roulent dans de gros véhicules, sont dans des bureaux climatisés », fait remarquer Assiétou Bah, l’une des femmes violées.
Le pool des juges d’instruction guinéens a auditionné plus de 450 victimes et inculpé une douzaine de personnes dont l’ex chef de la junte militaire au pouvoir à l’époque, Moussa Dadis Camara. Ce dernier vit actuellement en exil à Ouagadougou au Burkina Faso depuis la tentative d’assassinat qui l’a visé en décembre 2009.
Malgré la lenteur du dossier, la présidente de l’Association des victimes, parents et amis du 28 septembre 2009, Asmaou Diallo note des avancées. « 10 ans, c’est long. Ce n’est pas 10 jours ni 10 heures. Nous victimes réclamons justice malgré le retard. Nous espérons que justice sera rendue. A partir du moment où ils ont choisi le site où se tiendra le procès, annoncé le budget, nous estimons que la date peut venir », espère cette dame qui a perdu un fils lors des évènements du 28 septembre 2009.
Le comité de pilotage pour l’organisation du procès a, en effet, choisi les locaux de la Cour d’appel de Conakry comme lieu des audiences et annoncé un budget indicatif de plus 79 milliards de francs guinéens, soit plus de 8 millions de dollars américains. L’État guinéen supportera les 77% de ce montant.
A la veille de la commémoration des massacres, le ministre de la Justice par intérim a fait le point de l’évolution de la procédure judiciaire. Selon Mamadou Lamine Fofana, deux contingences empêchent la tenue du procès : « D’abord, il fallait un local pour abriter le procès. Il va falloir une salle d’audience digne de ce nom. La deuxième condition, il faut la préparation psychotechnique du personnel judiciaire, pas des magistrats, seulement ».
Après la fin de l’instruction, il faudra donc attendre la levée de ces contraintes pour l’ouverture du procès.
Dans un communiqué transmis aux médias, les ambassades des États-Unis, de France et la Délégation de l’Union Européenne soulignent «l’importance de la tenue d’un procès sans plus tarder, afin que les auteurs présumés de ces crimes puissent répondre dans les plus brefs délais de leurs actes devant la justice ».