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Politique

Bénin : Une nouvelle révision de la Constitution se profile à l’horizon, l’opposition exprime un refus catégorique

AWR

« C’est une polémique inutile qui n’en vaut pas la peine ». C’est là un extrait des propos tenus par le Secrétaire Général Adjoint et Porte-Parole du Gouvernement béninois le 9 janvier dernier. C’était au cours du point de presse hebdomadaire qui suit le Conseil des Ministres, où Wilfried Léandre Houngbédji a été interrogé par des journalistes sur une éventuelle révision de la Constitution. Un sujet qui a nourri les débats au sein de l’opinion publique depuis que la Cour Constitutionnelle a demandé au parlement, de modifier certaines dispositions du code électoral en vue de l’harmonisation du calendrier des élections générales de 2026 au Bénin.

Mais quelques temps après, ce que le porte-parole de l’exécutif a qualifié de rumeur se confirme. D’abord avec la rencontre entre le président de la République et les députés représentés à l’Assemblée Nationale, puis à la suite de la proposition de révision introduite par Assan Seibou, un élu du Bloc Républicain (BR), parti de la mouvance présidentielle. Patrice Talon a effet demandé aux parlementaires de trouver un consensus autour de la révision du code électoral afin d’éviter un chevauchement du calendrier électoral dans 2 ans. « Les discussions vont se poursuivre à l’Assemblée Nationale pour établir un consensus sur la manière de régler le problème d’égalité entre les parrains », a confié Aké Natondé, président du groupe parlementaire Union Progressiste (UP-le Renouveau), un autre parti proche du pouvoir.

Beaucoup de députés ont avoué qu’avec le chef de l’Etat, ils n’ont pas pu faire un débat de fond, parce que l’ordre du jour de cette rencontre n’était pas connu d’avance. « Ne connaissant pas l’ordre du jour, on n’a pas travaillé sur les questions qui nous donnent la possibilité de retourner à notre base pour discuter des éléments qu’on pourrait encore changer sur le code électoral outre ceux évoqués par la Cour Constitutionnelle », a déclaré Habibou Woroucoubou, député du parti d’opposition, Les Démocrates (LD).

C’est à la suite de ce tête-à-tête entre Talon et les élus du peuple, qu’une proposition de révision de la Constitution a été introduite à l’Assemblée nationale le 26 janvier dernier.

Face aux inquiétudes des uns et des autres et les implications de cette nouvelle modification de la loi fondamentale, le président de la République a une fois encore réaffirmé sa volonté de ne pas briguer un 3e mandat à la tête du pays. Une promesse qui ne rassure guère les partis d’opposition qui ont fait bloc derrière Les Démocrates. Lors d’une sortie conjointe le 29 janvier 2024, ils ont unanimement rejeté toute idée de révision de la constitution dans le contexte actuel, et ont exprimé leur refus catégorique de toute tentative de réaménagement du calendrier électoral.

 

PROPOSITION DE LOI PORTANT REVISION DE LA CONSTITUTION

Exposition des motifs

Par la loi n°2019-40 du 7 novembre 2019 portant révision de la loi n°90-32 du 11 décembre 1990 portant Constitution de la République du Bénin, le législateur a institué l’organisation d’une année électorale dans le but de l’alignement pertinent des élections en vue de correspondre la durée de tous les mandats électifs, d’assainir le rythme des élections et d’assurer la prépondérance des partis politiques d’envergure nationale dans la dévolution du pouvoir d’Etat.

Les dispositions prévues à cet effet sont :

Article 81

« La loi fixe le nombre des membres de l’Assemblée nationale, les conditions d’éligibilité, le minimum de suffrages à recueillir par les listes de candidatures au plan national pour être éligibles à l’attribution des sièges, le régime des incompatibilités et les conditions dans lesquelles il est pourvu aux sièges vacants.

La Cour constitutionnelle statue souverainement sur la validité de l’élection des députés ».

Article 153-1 :

« A titre d’élections générales, sont organisées dans une même année électorale, les élections législatives et communales simultanément, puis l’élection du président de la République.

Seules les listes ayant recueilli un minimum de suffrages exprimés au plan national pour chacune des élections, sont admises à l’attribution des sièges.

Ce seuil est fixé par la loi ».

Article 153-2 :

« Les élections couplées, législatives et communales, sont organisées le deuxième dimanche du mois de janvier de l’année électorale.

Les députés élus à l’Assemblée nationale entrent en fonction et sont installés le deuxième dimanche du mois de février de l’année électorale.

Les conseillers communaux élus entrent en fonction et sont installés entre le premier et le troisième dimanche du mois de février de l’année électorale ».

Article 153-3 :

« L’élection du duo président de la République et vice-président de la République est organisée le deuxième dimanche du mois d’avril de l’année électorale.

Un second tour de scrutin est organisé, le cas échéant, le deuxième dimanche du mois de mai.

En aucun cas, l’élection du duo président de la République et vice-président de la République ne peut être organisée simultanément avec les élections législatives et les élections communales.

Dans tous les cas, le duo président de la République et vice-président de la République élu entre en fonction et prête serment le quatrième dimanche du mois de mai ».

 

Analyse

L’article 153-1 alinéa 1 de la Constitution qui fixe l’ordre des élections au cours de l’année électorale, manque de préciser, en ce qui concerne la présidentielle, qu’il s’agit de l’élection du duo président de la République et vice-président de la République.

Ensuite, cette disposition fait précéder les élections législatives et communales de celle du duo président de la République et vice-président de la République. Or, l’ordre ainsi établi, d’une part, révèle des dysfonctionnements sur le terrain pratique et, d’autre part, affecte la nature du régime présidentiel.

Sur le terrain pratique en effet, l’organisation des élections législatives et communales avant l’élection du duo président de la République et vice-président de la République rend difficile l’organisation de la délivrance des parrainages par les élus procédant tous d’une même origine électorale. La décision DCC n°24-001 du 4 janvier 2024 a révélé quelques aspects de la rupture d’égalité entre les parrains, de sorte que la haute juridiction a enjoint à la Représentation nationale de procéder à la correction du Code électoral.

Toujours sur le terrain pratique, si la Constitution confère aux élus nationaux et communaux le pouvoir de parrainer les candidats à l’élection du duo président de la République et vice-président de la République, c’est en raison de leur légitimité politique. Or, en l’état actuel du dispositif, certains élus auraient parrainé en ayant perdu les élections ou en n’étant plus candidats à ces élections.

L’élection présidentielle est l’élection majeure dans un régime présidentiel parce que le président de la République est le titulaire du pouvoir exécutif et la clé de voute du régime constitutionnel et du système politique. A ce titre, l’élection du duo président de la République et vice-président de la République devrait être le fer de lance des séquences politiques déterminées par l’alignement des mandats électifs. L’organisation des élections législatives et communales avant celle du duo président de la République et vice-président de la République n’est pas l’idéal pour la nature présidentielle de gouvernance politique, économique et sociale.

Enfin, la question du minimum de suffrages exprimés requis pour l’éligibilité des listes de candidatures à l’attribution des sièges est abordée dans deux articles épars de la constitution. Il s’agit d’une part, de l’alinéa 1 de l’article 81 nouveau, logé sous le titre IV qui traite du pouvoir législatif et d’autre part, de l’article 153-1, du titre X-1 nouveau relatif aux élections générales ; ce qui ne permet pas une bonne lisibilité de la Constitution.

 

En conclusion :

1°) L’idéal est d’inverser l’ordre des élections en ce que cette inversion rétablit la prééminence des élections présidentielles dans le cycle électoral. Par ailleurs, cette inversion constitue également une solution législative qu’appelle la décision DCC n°24-001 du 4 janvier 2024 rendue par la Cour constitutionnelle, en vue de satisfaire non seulement au principe de l’égalité mais aussi au principe de légitimité des parrains conformément à l’esprit de la réforme du système partisan.

C’est pour cette raison qu’il est proposé la modification de l’article 153-1 alinéa 1 afin que l’élection du duo président de la République et vice-président de la République soit organisée avant celles des députés et des conseillers communaux.

2°) Il est par ailleurs proposé, pour une meilleure clarté de la Constitution, de soulager l’alinéa 1 de l’article 81, de la question des conditions d’éligibilité au partage des sièges. Ainsi, cette question sera globalement prise en compte par l’article 153-1 du titre X-1 nouveau relatif aux élections générales.

3°) Consécutivement, il est proposé que les articles 153-2 et 153-3 qui déterminent la date des élections soient modifiés dans le sens d’organiser l’élection du duo président de la République et vice-président de la République le premier dimanche du mois de février, le second tour de cette élection pourrait être alors organisé le quatrième dimanche du mois de février et le président de la République élu pourrait entrer en fonction et prêter serment le deuxième dimanche du mois de mars.

A la faveur de cette modification, il est également proposé de corriger la soumission du vice-président de la République à l’entrée en fonction et à la prestation de serment qui s’est glissée dans le quatrième et dernier alinéa de rédaction actuelle de l’article 153-3.

L’article 153-2 fixant la période de l’organisation des élections législatives et communales pourrait devenir le nouvel article 153-3. Il est recommandé que les élections couplées législatives et communales soient organisées dans l’année électorale, après l’entrée en fonction du président de la République, pour une meilleure articulation politique. Dans ces conditions, le mois de mai est proposé, d’autant qu’il permet que ces élections soient organisées avant la saison des pluies.

Aussi, l’installation des conseils communaux relevant des prérogatives de l’administration, il est proposé qu’elle se fasse dans les conditions prévues par la loi.

Enfin, la crainte du troisième mandat, exprimée par une partie de l’opinion publique est justifiée. Or, on a pensé que l’alinéa 2 de l’article 42 avait définitivement épargné le Bénin d’une telle dérive.

Ce texte dispose en effet que :

« En aucun cas, nul ne peut, de sa vie, exercer plus de deux mandats présidentiels »

La lettre de cette disposition, malgré l’intention claire du législateur, prête à équivoque et pourrait induire une interprétation qui autorise un troisième mandat. C’est pour cette raison qu’il est proposé de réécrire l’alinéa 2 de l’article 42 comme suit :

« Dans tous les cas, nul ne peut, de sa vie, exercer plus de deux mandats présidentiels »

C’est au bénéfice de ces observations que je vous prie, monsieur le Président de l’Assemblée nationale, de soumettre à l’examen de la Représentation nationale la présente proposition pour son étude et son adoption.

 

Porto-Novo Novo le 26 Janvier 2024

 

 

Député Assan SEIBOU

 

II-   Loi N° …………portant modification de la loi n°90-32 du 11 décembre 1990 portant Constitution de la République du Bénin modifiée par la loi n°2019-40 du 7 novembre 2019

L’Assemblée nationale a, conformément à la loi n°90-32 du 11 décembre 1990 portant Constitution de la République du Bénin modifiée par la loi n°2019-40 du 7 novembre 2019, délibéré et adopté en sa séance du…, la loi dont la teneur suit :

Article 1er :

Entre l’article 153-2 et l’article 153-3, l’ordre est inversé. En conséquence, l’article 153-2 est le nouvel article 153-3 ; l’article 153-3 est le nouvel article 153-2.

Sont modifiés, les articles 42 alinéa 2 ; 81 ; 153-1 ; 153-2 ; 153-3 ainsi qu’il suit :

Article 42 alinéa 2 nouveau :

« Dans tous les cas, nul ne peut, de sa vie, exercer plus de deux mandats de président de la République ».

Article 81 alinéa 1 nouveau :

« La loi fixe le nombre des membres de l’Assemblée nationale, les conditions d’éligibilité, le régime des incompatibilités et les conditions dans lesquelles il est pourvu aux sièges vacants.

La Cour constitutionnelle statue souverainement sur la validité de l’élection des députés ».

Article 153-1 nouveau :

« A titre d’élections générales, sont organisées dans une même année électorale, l’élection du duo président de la République et vice-président de la République, puis, simultanément, celles des députés et des conseillers communaux.

Pour ce qui concerne l’élection des députés et des conseillers communaux, seules les listes de candidatures ayant recueilli un minimum de suffrages exprimés au plan national, sont éligibles à l’attribution des sièges, dans les conditions fixées par la loi».

Article 153-2 nouveau :

« L’élection du duo président de la République et vice-président de la République est organisée le premier dimanche du mois de février de l’année électorale.

Un second tour de scrutin est organisé, le cas échéant, le quatrième dimanche du mois de février.

En aucun cas, l’élection du duo président de la République et vice-président de la République ne peut être organisée simultanément avec celles des députés et des conseillers communaux.

Dans tous les cas, le président de la République élu entre en fonction et prête serment le deuxième dimanche du mois de mars ».

Article 153-3 nouveau :

« Les élections couplées, législatives et communales, sont organisées le troisième dimanche du mois de mai de l’année électorale.

Les députés élus à l’Assemblée nationale entrent en fonction et sont installés le deuxième dimanche du mois dejuin.

Les conseillers communaux élus entrent en fonction et sont installés dans les conditions prévues par la loi ».

Article 2 :

La présente loi constitutionnelle entre en vigueur dès sa promulgation et sera exécutée comme loi de l’Etat.

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